Par Julien Sémelin, Manager, Programme Bassin Méditerranéen
Dans un précédent blog, mon collègue Luis Costa et moi-même avions décrit le fonctionnement des comités de pilotage qui supervisent la mise en œuvre de nos plans d’action. Ces plans impliquent en effet une coordination sans faille de plusieurs projets et partenaires autour d’objectifs communs. De plus, nous ambitionnons maintenant de ne plus mesurer l’impact des projets de manière individuelle, mais de manière collective à travers ces plans d’action. Ces comités joueront un rôle central dans ce sens. Dans ce précédent blog, nous avions aussi parlé de leur importance pour favoriser une culture commune et renforcer la durabilité des projets que nous finançons.
Plus récemment, lors d’une réunion de toute l’équipe de la MAVA, nous avons ouvert une fenêtre sur une question importante : la diversité de fonctionnement de ces comités. Nous faisions alors le point sur la mise en œuvre de nos 25 plans d’action. Lors d’une session de travail, nous avions comparé le mode de fonctionnement de trois de ces comités. Sans surprise, nous avions pu constater qu’ils étaient tous les trois très différents. Intéressant… Mais quand on sait que nous avons 25 comités de pilotages, alors nous avons 25 cas particuliers ?
Pour y voir plus clair, j’ai fait circuler un tableau à tous mes collègues. Je voulais connaître les principales caractéristiques des comités qu’ils supervisent. Une opportunité extraordinaire quand on y pense. 25 cas d’étude différents pour décrypter la recette d’un partenariat réussi… à rendre jaloux une armada de scientifiques.
La question de ces différentes formes de partenariats me taraudait depuis un moment. Lorsque nous avons mis en place ces coalitions, nous les avons nommées en puisant naturellement dans le jargon que nous maîtrisons le mieux, celui des projets. Nous les avons donc appelés « comités de pilotage ». Cependant, cette dénomination ne colle pas totalement à la dynamique qui se met en place au sein des plans d’action dont j’ai la charge. Suis-je le seul dans ce cas ? Ce petit tour d’horizon au niveau de la fondation tombe donc à pic.
Premier constat, nous avons bien différentes formes de partenariats. Si j’ose me risquer à une sorte de classification, nous avons :
♦ De vrais comités de pilotage à proprement parler (avec souvent un partenaire leader), où les partenaires sont en mesure de prendre des décisions collectives sur la conduite des plans d’action et de leurs projets ;
♦ Des formes de partenariats plus souples, dans lesquelles les partenaires collaborent autour d’objectifs communs, surtout dans le but de renforcer la coordination de leurs actions et les synergies entre eux ;
♦ Des partenariats plutôt « thématiques », qui réunissent des partenaires surtout dans un but de partage d’expérience et d’échange d’information.
Bien, mais alors quelles en sont les raisons qui ont conduit à ces différentes formes ? Pourquoi dans un cas, une coalition soudée s’est mise en place, alors que dans un autre, nous avons un groupe de partenaires qui recherchent avant tout une forme de coordination ? Voici quelques éléments de réponse à chaud.
Tout d’abord, la question du nombre de partenaires a une légère influence. Nos coalitions varient de 4 à 20 organisations. Ce n’est pas très marqué, mais il semble qu’au-delà d’une dizaine d’organisations, le besoin de coordination prenne le dessus sur la capacité à piloter un groupe. Logique.
L’existence de relations historiques est en revanche beaucoup plus déterminante. Certaines coalitions ont été montées très récemment, souvent spécifiquement pour la mise en œuvre des plans d’action. Dans ce cas il semble que l’absence d’habitude de travailler ensemble implique des relations plus timides. Du moins au départ. Toutefois, le contraire n’implique pas la création automatique d’un comité type « pilotage ». Si des organisations se connaissent de longue date, c’est qu’elles collaborent déjà par ailleurs. Parfois à travers d’autres coalitions. La valeur ajoutée de nos coalitions se trouve donc plutôt au niveau du cadre d’échange plus informel que nous offrons, permettant d’explorer des possibilités de synergies et de coordination de leurs actions.
La complexité des plans d’action est également un facteur important. Les plans d’action aux objectifs précis, comme celui sur la préservation des herbier marins en Afrique de l’Ouest, ont vu se développer des formes de partenariats plutôt de type « comité de pilotage ». On retrouve dans ces cas une configuration plus proche du modèle « projet ». En revanche pour des plans d’action comprenant des stratégies très diverses et impliquant la multiplication de connexions dans et en dehors de la coalition, c’est le besoin de coordination entre partenaires qui semble influencer la teneur du partenariat.
Enfin, la thématique abordée semble aussi avoir une influence. Les partenariats développés dans notre programme Économie Durable ont pris des formes plus souples et évolutives. Cela est sans doute lié au caractère nouveau et exploratoire des projets. En revanche, au sein de nos programmes Méditerranée et Afrique de l’Ouest, les organisations de la conservation se sont inscrites sur des formes de partenariats plus traditionnels, répondant sans doute à des modes de fonctionnement déjà éprouvés par le passé.
Cette « photo » de nos partenariats aujourd’hui va sans doute évoluer et il sera intéressant de refaire l’exercice dans quelques années. Mais maintenant que nous y voyons plus clairs, il est temps d’aborder la question : « qu’est-ce qui fait la recette d’un partenariat réussi ? ». Mais je suis déjà trop long pour ce blog, et je n’ai pas fini d’analyser ce fameux tableau. La suite dans un prochain numéro !