Par Mike Moser, membre du Conseil de la MAVA
Pour le Conseil de la MAVA, il est primordial d’assurer une durabilité de ses actions après la fin de ses financements en 2022. La Fondation fait donc de réels investissements afin d’aider nos partenaires à renforcer leurs capacités pour l’après-MAVA, et encourage les jeunes leaders à pérenniser la vision de notre fondateur, Luc Hoffmann, et de sa famille.
Mais un autre point est tout aussi important : la durabilité des projets que nos partenaires mettent en œuvre par le biais de nos Plans d’action. L’un des plus gros défis que rencontrent les ONGs est la recherche de solutions alternatives lorsqu’un l’un des bailleurs principaux d’un projet cesse ses financements. Peu d’organisations ont le luxe d’avoir suffisamment de financements (core funding) pour combler ce genre de besoin – la réaction habituelle est donc de chercher rapidement des donateurs de substitution ! Trop souvent, c’est le signe qu’il n’y aura pas de suite durable possible (alors que cela avait pourtant été promis au départ au donateur !). En bref et pour dire les choses clairement : un projet ou un programme réussi ne doit pas avoir besoin d’être continuellement refinancé. Il faut rendre les résultats durables afin de pouvoir avancer et passer à d’autres priorités !
En tant que membre du Conseil de la MAVA, je surveille très attentivement les indicateurs du tableau de bord préparé par la Fondation pour suivre la durabilité des Plans d’action et des projets que nous soutenons – et actuellement, il y a bien trop d’indicateurs orange ! J’utilise donc ce blog pour presser tous nos partenaires à concentrer leurs efforts sur la recherche d’une solution durable pour la suite des projets actuellement financés par la MAVA. Je sais que c’est une demande facile à faire mais difficile à mettre en pratique. Lorsque je réfléchis aux différentes approches possibles permettant de se retirer d’un projet tout en assurant sa durabilité, je me demande quels sont les enseignements que j’ai tirés de toutes mes années passées à travailler avec des ONG et autres acteurs. Les approches réussies tombent en général dans l’une ou plusieurs de ces trois catégories :
Le Big Bang
C’est probablement l’approche la plus intéressante, car la fin d’un projet marque le début d’un nouveau départ, avec une vie et un élan qui lui sont propres. Citons comme exemple la création d’un nouveau Parc national dans votre zone d’intervention, la création d’un nouveau mécanisme de financement, ou un nouveau « mouvement » environnemental (Luc Hoffmann souhaitait clairement un Big Bang lorsqu’il a participé à la naissance de la Convention de Ramsar, par exemple). Dans cette catégorie, j’aime donner l’exemple de la création de la réserve de biosphère de l’UNESCO de Baa Atoll, et le Fonds fiduciaire qui l’accompagne dans les Maldives. C’est seulement à mi-parcours du projet que nous avons réalisé qu’un tel Fonds permettrait d’assurer une durabilité au projet, et notre équipe a travaillé dur jusqu’au dernier jour de ce projet de 6 ans pour y parvenir – assez stressant, je l’avoue ! Toutefois, plusieurs années plus tard, nous voyons que les résultats souhaités sont encore présents, largement financés par le secteur touristique.
L’enseignement à tirer : une approche Big Bang peut apporter des résultats remarquables, mais en cas d’échec, tout l’investissement peut être perdu – donc assurez-vous que cette approche est réalisable, ou ayez un bon ‘plan B’ !
L’appropriation par la communauté
Lorsqu’une communauté s’approprie les résultats de votre projet parce qu’ils lui apportent des avantages, j’estime qu’il s’agit là d’une des solutions les plus durables (voir également ci-dessous l’importance de l’alignement avec les priorités gouvernementales). Cependant, mobiliser les communautés d’une façon durable sur le long terme peut s’avérer difficile, et requiert des compétences que nous ne possédons pas tous naturellement. Trop souvent, nous nous retrouvons à « prêcher aux convertis », alors qu’une grande partie de la communauté (celle qui cause peut-être le plus de problèmes au niveau environnemental) est absente de la table.
L’enseignement à tirer : faites appel à des spécialistes qui ont une expérience prouvée dans la mobilisation des communautés. La plupart du temps, on peut atteindre des résultats durables si l’on travaille avec les organisations communautaires déjà existantes ; ou, si elles n’existent pas, il convient d’encourager leur émergence (mais pas de les diriger). Identifiez des leaders au sein de la communauté, et permettez-leur de plaider en faveur de votre programme, plutôt que de chercher à plaider vous-même !
L’alignement avec les priorités gouvernementales
Le soutien officiel du gouvernement en termes de politique, de législation et de financement en faveur des résultats que vous souhaitez obtenir est quasiment un prérequis pour garantir le succès des approches « Big Bang » et « Communautaire » sur le long terme. Mais les gouvernements ont tendance à suivre – vous devrez donc souvent travailler avec les mécanismes existants sur le court et moyen terme.
L’enseignement à tirer : envisager des objectifs visant à garantir une nouvelle législation, des nouvelles structures gouvernementales ou des nouvelles lignes budgétaires peut être très risqué pour un projet, du fait des échéances souvent incertaines et très longues nécessaires pour les prises de décisions. La plupart du temps, il vaut donc mieux travailler au sein de la législation (quitte à rédiger de nouveaux règlements ou directives) et des structures existantes, et intégrer de façon créative votre approche dans les lignes budgétaires en place afin qu’elle devienne le quotidien des employés gouvernementaux.
J’en appelle donc aujourd’hui à tous les partenaires de la MAVA : c’est MAINTENANT qu’il faut anticiper la fin des financements de la MAVA et préparer la suite de vos projets – en 2021 ou 2022, il sera beaucoup trop tard. Il est temps de mettre tous les indicateurs au vert. Bon courage à vous tous!